On pourrait croire que sa silhouette est venue des sables, dressée sur les strates du falun à la manière d'un bâtiment de corsaire rendu au rivage après un après-midi de brume, au-dessus des lises qui trompent les égarés de la Baie du Mont. Mais cette maison est comme une vigne de Touraine, qui puise sa beauté du sol de craie rempli de coquillages blancs, cette poudre d'océan qui répand la blancheur laiteuse du ciel à nos pieds, tandis que les caravanes de coton qui éclatent en dégradés de laques grises ou blanches, passent en douceur au-desssus des toits huilés et polis d'ardoise bleu corbeau, au gré d'un vent qui ralentit le pas. Cette-maison poème, faite de strophes où tout rime avec les roses, grandit sans cesse en saveur et en beauté, elle est un grand calice de douceur où les yeux puisent toujours, à travers le miroir des années, des récits de famille et des raisons subtiles pour l'aimer. Elle fut de tous les âges, entre les nuages et le ciel, tendant sa voile-pignon dans le sens des courants parfumés qui viennent des blés, entre les fûts des peupliers géants qui lui servent de gardiens et retiennent les chants de saints venus du ciel. Il lui faut tout le souvenir d'un royaume de fées aboli pour s'épancher dans nos coeurs, et lorsqu'elle est sûre de l'amour des siens, avec sa pointe distraitement cardant les pelotons de nuages aux ailes angéliques, elle se met à chanter, d'un grand choeur d'enfants aimés qui s'y embarquent comme dans une arche, et dispersent dans les airs souples venus de la Loire voisine, tout l'amour dont elle sait se charger, comblée jusqu'aux bords et dans ses profondeurs d'un cantique qui célèbre sa constance et sa beauté.
e. levergeois - extrait de Hommage à la Noue - droits déposés -texte à paraître dans la revue europe en mai 2008 avec neuf autres - quelle joie!!!
e. levergeois - extrait de Hommage à la Noue - droits déposés -texte à paraître dans la revue europe en mai 2008 avec neuf autres - quelle joie!!!